8 Conditions pour que l’Evaluation des Enseignements par les Etudiants ait un effet réel sur l’amélioration de l’enseignement

Dans ce billet, je vais aborder la question de l’Evaluation des Enseignements par les Etudiants (EEE) : quelles sont les conditions nécessaires pour que l’EEE ait un effet réel sur l’amélioration de la pratique d’enseignement ? Avant d’aborder ces conditions, rappelons ici qu’il y a deux visées possibles de l’EEE : une visée formative et une visée institutionnelle ou de contrôle (Romainville & Coggi, 2009; Younes, 2007):
– Visée formative: L’évaluation des enseignements par les étudiants sert à obtenir des informations qui permettront à l’enseignant d’améliorer sa pratique, si nécessaire.
– Visée institutionnelle ou de contrôle : l’évaluation sert à évaluer l’enseignement dans le but de renouveler/promouvoir ou non l’enseignant dans ses fonctions. J’ai abordé la visée institutionnelle de l’EEE dans un précédent billet intitulé « Comment évaluer la partie enseignement du métier d’enseignant-chercheur ? ».
Imaginez un axe, à l’une des extrémités il y aurait l’EEE à visée formative et à l’autre extrémité, l’EEE à visée institutionnelle. Les universités se positionnent toutes différemment sur cet axe. Dans certaines universités, l’EEE est uniquement à visée institutionnelle ou tend vers cette extrémité, alors que dans d’autres universités l’EEE est uniquement à visée formative ou tend vers cette extrémité. Dans ce billet je vais m’intéresser uniquement à la visée formative de l’EEE, c’est-à-dire lorsque l’EEE constitue une stratégie de soutien au développement professionnel de l’enseignant universitaire.

Du côté de l’institution, il y a quatre conditions à respecter pour que l’EEE favorise le développement professionnel des enseignants universitaires (Berthiaume, Lanarès, Jacqmot, Winer, & Rochat, 2011, p. 59):
1- Confidentialité : les résultats doivent être confidentiels, ils sont transmis uniquement à l’enseignant. C’est lui qui choisit de les partager ou non avec ses étudiants, ses collègues ou ses supérieurs.
2- Responsabilité : l’enseignant doit pouvoir choisir quel(s) enseignement(s) il souhaite faire évaluer et quand.
3- Adaptabilité : la démarche de l’EEE doit pouvoir s’ajuster à l’enseignant. Le questionnaire d’évaluation doit être modulable et modifiable pour qu’il puisse correspondre aux spécificités disciplinaires et aux aspirations de l’enseignant, à ce qu’il souhaite évaluer.
4- Réflexivité : pour que les résultats de l’évaluation soient utiles à l’enseignant, il est nécessaire que l’institution dispose de moyens pour l’accompagner dans son processus réflexif (Berthiaume, et al., 2011).

—> L’EEE qui est proposée au Centre de Soutien à l’Enseignement de l’université de Lausanne s’inscrit dans une démarche principalement formative. Vous pourrez lire ICI ce qu’ils mettent en place pour parvenir à réunir ces quatre conditions.

Du côté de l’enseignant, il y a quatre conditions qui doivent être satisfaisantes pour que l’EEE contribue à une réelle amélioration de la pratique d’enseignement (Centra, 1993):
1- Informations nouvelles : Les résultats de l’évaluation doivent apporter des informations nouvelles à l’enseignant concernant ses activités d’enseignement.
2- Valeur accordée : Les résultats de l’évaluation doivent être jugés pertinents par l’enseignant. Il doit accorder de l’importance et du crédit à la démarche d’évaluation.
3- Comment changer : Il doit savoir quels changements introduire et comment améliorer sa pratique.
4- Motivation : Il doit être motivé pour faire évoluer sa pratique.

En m’appuyant sur les quatre conditions décrites par Berthiaume et al. (2011) et celles décrites par Centra (1993), je vous propose un graphique en radar qui peut servir d’outil d’(auto)évaluation pour les enseignants. Cet outil peut donner une indication sur l’effet ou l’absence d’effet que pourrait avoir l’EEE sur votre propre développement professionnel en tant qu’enseignant.

A gauche, il y a le graphique à remplir et à droite un exemple de graphique déjà rempli. Il suffit d’évaluer chaque condition sur une échelle de 1 à 5. Plus le quadrangle est proche des valeurs 5 plus l’EEE tendra à avoir un effet réel sur l’amélioration de votre pratique d’enseignement.

– Bernard, H. (2011). Comment évaluer, améliorer, valoriser l’enseignement supérieur ? Bruxelles: De Boeck.
– Berthiaume, D., Lanarès, J., Jacqmot, C., Winer, L., & Rochat, J. M. (2011). L’évaluation des enseignements par les étudiant-e-s comme dispositif de développement pédagogique des enseignant-e-s universitaires. Recherche et formation, 67, 53-72.
– Centra, J. A. (1993). Reflexive faculty evaluation: Enhancing teaching and determining faculty effectiveness. San Francisco: Jossey-Bass Publishers.
– Romainville, M., & Coggi, C. (2009). L’évaluation de l’enseignement par les étudiants.Bruxelles: De Boeck.
– Younes, N. (2007). À quelles conditions l’évaluation formative de l’enseignement par les étudiants est-elle possible en France ? Revue française de pédagogie, 161(Octobre-décembre), 25-40.

Dessin issu de mon site La thèse nuit gravement à la santé